Cannes : Lu Chuan trouve un distributeur pour son prochain film, « The last Supper »

Publié le par brigitteduzan

Le festival aura souri à Lu Chuan (陆川) : son prochain film, « The Last Supper » (《王的盛宴》), actuellement en cours de tournage, y a trouvé un distributeur hors Asie. C’est la société française Wild Bunch qui en a acquis les droits.

 

En fait, comme d’habitude, le festival n’a été que l’étape conclusive d’un processus commencé dès la sortie en 2009 du précédent film de Lu Chuan,  « The City of Life and Death » (《南京! 南京! ), sur le massacre de Nankin (1), qui avait attiré l’attention sur le réalisateur. Un représentant de Wild Bunch s’était donc rendu sur le tournage de « The Last Supper » et manifesté l’intérêt de la société.

 

Un film sur un événement historique célèbre…

 

Le film s’inspire d’un événement historique légendaire, le banquet de Hongmen (“鸿门宴”), qui scella le sort du célèbre Xiang Yu (项羽), en 206 avant Jésus-Christ.

 

Après la mort du premier empereur, la population de l’ancien Etat de Chu (楚国), qui avait été annexé lors de l’unification de l’empire, commença à se révolter et mena des insurrections violentes. L’un des rebelles se proclama roi de Chu, mais il fut vaincu par Xiang Liang, oncle de Xiang Yu, qui prit la tête des opérations après la mort de son oncle.

 

Il se proclama « hégémon de l’Etat de Chu de l’Ouest » (西楚霸王 Xīchǔ Bàwáng) et régna un temps sur un vaste territoire couvrant les provinces actuelles du Shanxi, Henan, Hubei, Hunan et Jiangsu. Il était inévitable qu’il entrât en guerre contre Liu Bang (刘邦), futur fondateur de la dynastie des Han, qui avait acquis, lui, une position importante côté Qin.

 

Jouissant alors d’une écrasante supériorité numérique sur son adversaire, à l’instigation de son conseiller Fan Zeng (范增), Xiang Yu projeta une vaste opération militaire pour l’anéantir, mais il fut trahi par l’un de ses oncles. Renonçant à attaquer Liu Bang, il l’invita à un banquet. Au cours des festivités, poussé par Fan Zeng à assassiner son rival, il ne s’y résolut cependant pas et le laissa repartir sain et sauf. Il alla ensuite de défaite en défaite, et, vaincu et gravement blessé, se suicida en 202 avant Jésus-Christ, à l’âge de trente ans.

 

Le nom de Xiang Yu était surtout connu jusqu’ici par l’histoire de ses derniers moments avec sa jeune concubine Yu Ji (), popularisée sous le titre « Adieu ma concubine » (《霸王别姬》), qui a donné à la fois des opéras, des séries télévisées et des romans, et qui est évoquée par le film éponyme de Chen Kaige, Palme d’or du festival de Venise en 1993 (2).

 

… qui s’inscrit dans le contexte actuel de repli prudent

 

« The Last Supper » est bien présenté comme relatant « un autre » événement historique déterminant dans l’histoire chinoise (après le massacre de Nankin), suggérant une suite au précédent film. Le casting, au moins, est soigné, avec Liu Ye () dans le rôle de Xiang Yu, et Daniel Wu (吴彦祖) dans celui de Liu Bang.

 

En réalité, Lu Chuan s’aligne sur la plupart de ses confrères chinois, qui, dans le contexte actuel de raidissement des conditions de censure dans tous les domaines, préfèrent choisir des sujets « sûrs » : l’histoire ancienne, et dans sa version officielle. « Je vais raconter l’histoire ancienne dans une vision moderne, » se défend Lu Chuan. C’est ce qu’ils disent tous.

 

On peut s’attendre à voir fleurir ce genre de films. Même Chen Daming (陳大明), réalisateur de comédies à succès dont, récemment, « What the women want »  (我知女人心), nous disait récemment, à Udine, que son prochain film serait … un film historique. S’il en fait une comédie, ce serait peut-être intéressant.

 

Mais, comme disait Geneviève Tabouis dans le temps, attendez-vous à savoir… qu’il y aura encore bien peu de films chinois à Cannes l’an prochain si cela continue ainsi. On attend le festival de Shanghai avec impatience pour prendre la température du fond de l’air…

 

Notes

(1) Voir l’article du 8 mai 2009.

(2) Sur le film de Chen Kaige, voir les articles des 27 et 30 avril sur ce blog.

L’histoire a également inspiré Zhang Ailing qui a écrit en 1937 une courte nouvelle sur le sujet, également intitulée « Adieu ma concubine » (《霸王别姬》). C’est un petit joyau, à lire sur le site chinese short-stories :

http://www.chinese-shortstories.com/Nouvelles_de_a_z_ZhangAiling_Adieu_ma_concubine.htm



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